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Mes Chefs-d'oeuvre (by Estrildis)

Publié : 26 août 2010, 14:01
par H@n Solo
PF-4728
Un jeune homme pénétra dans le hangar et tomba en admiration devant le spectacle. Etel Delcer, mécanicien de la Flotte Impériale, observait sa première affectation : un Navire d'Exploration, le Disbrigo. Un peu intimidé, il avança lentement vers le vaisseau, les yeux levés. Jusqu'au moment où il percuta l'un des chariots élévateurs occupés à charger la navette. Un officier descendit alors de la rampe d'accès pour l'accueillir :
- Alors, comment tu la trouves, petit frère ?
- Vraiment splendide !
- Suis-moi, je vais te faire visiter mon bijou ! Et ta maison pour les douze mois à venir.

Durant trois jours, les frères Delcer préparèrent le départ de leur mission. Daran supervisait les opérations. Etel découvrait les différents systèmes et participait à la révision générale avec les mécaniciens de la base. Il voulait tout connaître et ne cessait de poser des questions : son frère lui offrait une place de second sur son bâtiment et il souhaitait plus que tout être à la hauteur de sa tâche. Et travailler sur une machine aussi exceptionnelle l'excitait. La découverte d'un nouveau parc d'attractions ne l'aurait pas plus enthousiasmé. Il passait ses nuits à admirer cette merveille et à lire la documentation technique. Jusqu'au jour du départ. Etel posa alors avec les autres membres de l'équipage : son frère, huit hommes du Corps des Eclaireurs Impériaux, un homme d'une cinquantaine d'années avec une barbe blanche et une jeune femme blonde qu'il reconnut comme étant la fille aîné du Responsable de la Base de Rhen Var. Ils avaient déjà fait une mission tous ensemble. Sauf Etel. Et il se sentit soudain bien seul.

Journal de bord du Disbrigo.
Départ de Rhen Var avec un équipage complet. Capitaine Daran Delcer, responsable de l'expédition. Lieutenant Etel Delcer, second et mécanicien. Alkan Verum, géologue. Tilina Stalker, spécialiste en biosciences. Huit éclaireurs sous les ordres du Sergent Petroc Farzer.
Mission de recherche de ressources exploitables et de possibilité d'implantation de postes avancés de l'Armée Impériale. Durée estimée à une année standard.

Une immense boule verte striée de bleu emplissait la verrière du poste de pilotage du Disbrigo. Daran Delcer réveilla son jeune frère, endormi dans le siège du copilote, d'une pichenette sur la joue et siffla les deux scientifiques pour qu'ils reprennent leur place.
- Tu voulais voir la galaxie, petit frère ? Je te présente PF-4728. Planète forestière de taille moyenne sans satellite. Gravité standard. Pas d'espèce intelligente recensée. Pas de visite officielle depuis 147 ans. Et au nom de l'Empereur Palpatine, baptisée dorénavant Daran 42.
- Daran 42 ?
- C'est un joli nom, n'est-ce pas ? En tant que premier officier impérial à me poser sur cette planète, il est normal que je lui donne mon nom. Et comme elle est la quarante-deuxième à avoir cet honneur.
Un rire tonitruant retentit derrière lui :
- Ne vous inquiétez pas, Stalker. Un jour aussi, vous porterez mon nom.
- Même pas en rêve, Delcer. Fussiez-vous l'unique être vivant dans la galaxie, je me passerais tout de même de vous. Maintenant avec votre permission, Capitaine, je descends préparer les détecteurs longue portée.
Alors que la biologiste quittait son siège, Daran souffla à son frère avant de la suivre :
- Elle est folle de moi ! Juste qu'elle ne s'en rend pas encore compte.
Etel prit les commandes et se retourna vers son dernier compagnon, Alkan Verum :
- C'est toujours comme ça ? demanda-t-il
- Globalement, oui. C'est mon troisième voyage avec eux et je peux affirmer sans risque que vous venez d'assister à un échantillon représentatif.
- Ah ! Et qu'elle soit la seule femme à bord ne pose pas de problème ?
- Tilina sait se défendre. Et c'est elle qui est en charge de la nourriture, alors, croyez-moi, après le premier repas local, vous ne ressentirez plus que de la haine à son égard.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 1er jour.
Conformément aux directives du Haut Commandement des Renseignements Impériaux, orbite de 24h standards autour de la planète PF-4728 et diffusion du message d'identification. Sphère de 8639 km de diamètre équatorial. Durée de la journée : 20h standard. Aucun satellite. Aucune activité industrielle décelée par les détecteurs longue portée.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 2ème jour.
Conformément aux directives du Haut Commandement des Renseignements Impériaux, repérage des sites particuliers de la surface en vol atmosphérique. Planète forestière avec trois continents, traversés de multiples fleuves de grande taille et baignée par un océan. Relief peu accidenté. Large dominance des plaines et marécages. Répartition terre/eau : 39%/61%. Formes de vie animale décelées aux senseurs courte portée. Composition de l'atmosphère : 23% d'oxygène, pas de gaz toxiques détectés.

Après deux journées à observer la planète du vaisseau, le groupe d'exploration était impatient de pouvoir enfin fouler ce nouveau sol. En particulier les deux scientifiques. La navette se posa dans une clairière et avant la première sortie le Capitaine Delcer rappela à l'équipage les consignes officielles lors d'un premier contact sur une planète inconnue : équipement léger standard, kit de survie avec masque à oxygène, comlink mains libres, deux armes de poing, exploration par groupe de deux minimum et interdiction de s'éloigner à plus de 200 mètres de la navette. Ensuite, chacun prépara son paquetage et enfila gants et masque. La passerelle d'accès fut enfin abaissée. Les commandos descendirent en premier, fusils blasters levés et les autres leur emboîtèrent le pas. Une fois la zone sécurisée, le groupe se divisa en deux équipes. Et Etel Delcer se retrouva avec Alkan Verum comme partenaire. Alors que le mécanicien était fasciné par la hauteur des arbres encerclant la clairière, son collègue semblait ne s'intéresser qu'au sol.
- C'est quoi votre rôle dans l'équipe ? demanda le jeune homme intrigué
- Je suis géologue. Expert en tectonique et minéralogie, lui répondit l'autre en sautant sur place pour tester la souplesse du terrain.
- Ah ! Vous êtes le spécialiste des cailloux !
- C'est ça, le spécialiste des cailloux, répéta le scientifique dépité.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 3ème jour.
Conformément aux directives du Haut Commandement des Renseignements Impériaux, premier contact rapide à la surface dans une clairière de l'hémisphère nord. Analyse de toxicité négative. Poursuite des opérations en tenues camouflées non protégées.

Ensuite, vinrent les choses sérieuses. Débarrassée de ses combinaisons chimiques, l'expédition put se pencher plus efficacement sur ses travaux. Suite à sa maladresse de la veille avec le géologue, le jeune Delcer devint cette fois-ci l'assistant d'un jour de Tilina Stalker. Avec l'aide de deux soldats, il mit en place plusieurs dispositifs d'enregistrement aux abords d'un point d'eau pour évaluer la diversité de la faune locale. Alors qu'il effectuait des réglages sur la commande centrale, à quatre pattes, la tête dans la machine, il entendit un frémissement dans les buissons. Il se redressa et chercha du regard l'origine du bruit. Rien. Il était seul. Il allait se remettre à l'ouvrage quand il sentit quelque chose tirer sur sa botte gauche. Il poussa un hurlement et sauta à pieds joints sur le boîtier, un outil levé à la main.
- Formidable ! s'écria une voix féminine.
Tilina Stalker sortit alors d'un talus sur la gauche d'Etel, le sourire aux lèvres. Le jeune homme, toujours perché, se sentait particulièrement ridicule et aurait souhaiter disparaître de sa vue. Mais la biologiste ne semblait pas l'entendre ainsi et lui présenta son agresseur, un petit rongeur, à peine plus gros qu'un poing fermé.
- Saviez-vous, lui demanda-t-elle, que sur la très large majorité des planètes les rongeurs sont comestibles ?
- Euh… Non ! répondit Etel, toujours aussi gêné de la situation.
- Ce qui signifie, jeune homme, que selon toute probabilité, vous venez à l'instant de découvrir le dîner ! ajouta-t-elle, très excitée.
- Ah ! Super, alors.
- Et s'ils sont tous aussi peu farouches que celui-ci, nous n'aurons aucune difficulté à nous alimenter.

Les éclaireurs avaient établi un campement provisoire tout autour de la navette avec le matériel contenu dans la soute. Autour d'une table, le Capitaine Delcer discutait avec deux soldats des cartes établies dans l'après-midi. Le géologue effectuait des tests de caractérisation sur quelques échantillons tandis que la biologiste préparait le repas autour d'un feu. Lorsque ce fut cuit, toutes les autres activités cessèrent et chacun alla au ravitaillement. Traditionnellement, toute l'équipe se regroupait pour dîner et échanger des informations sur les progrès de la journée. Une fois son assiette remplie, Etel s'assit sur une caisse un peu à l'écart, toujours un peu honteux des événements de la journée. Et ce qu'il trouva dans sa gamelle ne lui plut guère : un minuscule morceau de viande accompagnait une bouillie verte foncée peu engageante. Surtout en tournant sa cuillère dans le récipient, il se rendit compte qu'il n'avait pas à faire à une purée, mais à un ensemble fibreux. Après une longue hésitation, il se décida à porter la mixture à sa bouche. La saveur était à la hauteur de ce que lui avaient indiqué ses yeux : épouvantable. L'air dépité, il leva la tête et constata que les autres membres du groupe n'en menaient pas large non plus. Mis à part son frère qui félicitait avec véhémence la cuisinière. Peut-être un peu trop pour être totalement honnête.
- Je n'arrive pas à choisir, souffla son voisin à Etel. Qu'est ce qui est le pire ? L'aspect, le goût ou l'odeur ?
- Le package, répondit-il en souriant, avant de se rendre compte surpris que le Sergent Petroc Farzer avait fini son plat. Vous avez réussi à finir, ça ?
- Tu sais, petit, c'est comme tout le reste dans le Corps des Eclaireurs Impériaux : c'est toujours moins pire que le cantonnement sur Rhen Var. La nourriture, la paie, les conditions de travail, en comparaison, ici, ce sont des vacances. Et tu verras quand tu auras, comme moi, dix ans de service, tu pourras même manger ton frère !

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 4ème jour.
Premières opérations de recherche des ressources exploitables. La biologiste Stalker a découvert des plantes et des animaux comestibles. Premier repas local. Le géologue Verum a prélevé plusieurs échantillons de roches qui sont en cours d'expertise.

Alors que tout le reste de l'équipe se préparait pour une nouvelle journée d'exploration, Etel Delcer tardait à sortir de son lit. Son frère, étonné de le voir sauter le petit déjeuner, décida d'aller le secouer un peu. Il le trouva brûlant de fièvre et couvert de gros boutons rouges. Effrayé, Daran recula tout d'abord de trois pas, avant de s'enfuir en courant. Une fois dehors, il souffla un bon coup et tenta de retrouver ses esprits. Son attitude n'était pas digne d'un officier de la Marine Impériale. Il devait penser à ses hommes et prendre les mesures qui s'imposaient, même si elles concernaient son frère cadet. Un membre de l'équipage était malade, très certainement contagieux, il était donc indispensable de le mettre en quarantaine. Il rassembla les autres et leur expliqua le problème. Tilina Stalker soupira et entra à grandes enjambées dans la navette. Delcer court à sa suite dans les coursives :
- N'avez-vous pas entendu ce que j'ai dit, Stalker ?
- Jusqu'ici, je n'étais pas sourde, ironisa-t-elle. Votre frère était en parfaite condition, il y a huit jours, au départ de Rhen Var. Selon toutes probabilités, il n'a rien. Alors, en tant que médecin de bord, je demande à l'ausculter avant que vous ne signiez le décret de mise à l'isolement.
- Et s'il est contagieux ?
- Dans ce cas, nous aviserons.

La biologiste s'approcha de la couchette où était étendu Etel et enfila une paire de gants. Le jeune homme semblait très mal, il avait les yeux dans le vague. Elle lui sourit, lui souffla des mots rassurants à l'oreille et lui assura que tout allait s'arranger. A le voir ainsi, elle avait des doutes, mais il ne sembla pas le remarquer. Tilina examina les boutons du malade : de ces grosses plaques rouges, il en avait partout, sur la figure, sur les bras, sur le torse. Ce n'était pas très bon signe. Elle lui posa encore quelques question, puis le laissa se reposer.
Stalker ressortit du vaisseau, inquiète. Il se pourrait que les craintes du capitaine soient fondées, après tout. Elle prit à part Daran Delcer et Petroc Farzer, les deux plus expérimentés du groupe et leur parla de ses préoccupations.
- Avec la cuisine que vous nous avez faites hier, je pencherais pour une intoxication alimentaire, railla le commando.
- S'il est impossible d'écarter, à cette heure, toute hypothèse, celle-ci me paraît grandement improbable, répliqua sèchement la biologiste. Pour la bonne et simple raison que ma cuisine aurait fait d'autres victimes. Et, pour votre gouverne, j'effectue des tests pour vérifier la non-toxicité des aliments avant de vous les servir.
- Inutile de nous disperser, coupa Delcer, agacé. Nous disputer ne résoudra pas le problème.
Tandis qu'ils se disputaient, Tilina remarqua un fait qui attira son attention. Juste derrière Farzer, un jeune éclaireur se grattait la joue et presque aussitôt une marque rouge se forma sur sa figure. Elle se souvint qu'Etel avait parlé de démangeaisons atroces et qu'il avait sur les bras des boutons écorchés. Elle s'approcha du jeune soldat et l'interpella :
- A votre place, je cesserais de me gratter ainsi. Et j'irais rapidement me laver les mains et la figure. Ensuite, je vous appliquerai une pommade apaisante et vous m'indiquerez où vous êtes allé vous frotter.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 5ème jour.
Découverte d'une plante hautement urticante. Symptômes : plaques rouges, fortes démangeaisons et fièvre. Les agents touchés ont été placés en service réduit. Premiers résultats géologiques décevants : terrain trop friable pour l'implantation de sites importants et absences de minerai intéressant. Changement de site principal d'exploration.

Re: Mes Chefs-d'oeuvre (by Estrildis)

Publié : 26 août 2010, 14:02
par H@n Solo
(Suite de PF-4728)

Après s'être vu administrer des soins par Stalker, Etel Delcer avait rapidement récupéré. De ses mésaventures de la veille, il ne lui restait plus que quelques pansements imprégnés de pommade calmante sur la joue gauche et les bras. Son médecin lui avait de plus assuré qu'il ne garderait pas de cicatrice. Néanmoins, fort de cette première expérience malheureuse, Etel avait décidé de se tenir le plus loin possible des fougères irritantes, et de tout végétal en général. Une fois que l'équipe eut changé de camp de base, il se découvrit une toute nouvelle passion pour la minéralogie et se proposa d'assister Alkan Verum dans ses prélèvements d'échantillons.
L'attitude du jeune homme amusa beaucoup le géologue. Ancien professeur universitaire, il en avait vu passer d'autres dans sa carrière. Et Etel se révélait être un collaborateur précieux et efficace. Surtout que le nouveau site, localisé dans les contreforts d'un massif montagneux, présentait des caractéristiques plus intéressantes que le précédent. Tandis qu'ils préparaient un prélèvement, Etel s'arrêta à cause de ses démangeaisons.
- Ça te picote toujours ?
- Hein ?
- Tu sais, gamin, on en est tous passé par là. Certains doublent de volume après une piqûre d'insecte. D'autres font des réactions allergiques à certains aliments locaux. Aucun d'entre nous n'y échappe. Il n'y a aucune honte, c'est ce qui nous apprend à être plus prudent.
Le jeune homme leva les yeux vers son collègue, un peu gêné. Et ce qu'il lut dans le regard du vieil universitaire le mit en confiance. Il ne semblait pas se moquer de lui, ni le juger. Il paraissait sincèrement vouloir l'aider. Etel comprit alors qu'il n'avait pas besoin de jouer au héros.
- A certains moments, ça me lance, lâcha-t-il.
- C'est sûrement la crème qui est moins efficace. Quand on rentrera, tu feras changer tes bandages. Dans quelques jours, ça sera passé.
Ils reprirent ensuite le travail : carottage, relevé d'altitude, description des affleurements rocheux ou encore tracé des cours d'eau. Ces activités étaient certes longues et à effectuer avec minutie, mais elles leur permettaient de discuter. Ayant enfin trouvé une oreille attentive à ses propos, le géologue se mit en devoir d'enseigner à son jeune compagnon les rudiments de son métier. Comment identifier les différentes ressources. Leurs différentes utilisations. Les dispositions indispensables à l'implantation d'un site. Les cours étaient entrecoupés par des anecdotes sur les précédentes expéditions du scientifique et son passé d'enseignant. Etel apprit ainsi que lors de sa première mission, son frère avait été tellement malade que le chef d'expédition avait été à deux doigts d'ordonner le retour sur Rhen Var. Ou comment la désir de découvrir de grandes choses avait poussé le géologue à quitter son poste de professeur pour s'engager dans le Corps Expéditionnaire. Delcer écoutait son aîné avec une attention presque religieuse. La journée passa si vite qu'il fut surpris lorsque Verum l'arrêta pour rentrer au campement.

Lorsqu'ils arrivèrent, les bras chargés de matériel et de spécimens à analyser, la nuit était déjà tombée et les autres membres de l'équipe étaient regroupés autour du feu pour le repas. Daran les regarda avec un air mauvais et leur présenta un chronomètre pour leur signifier qu'ils étaient en retard. Puis, il leur fit de longues remontrances publiques sur leur inconscience face aux dangers nocturnes avant de leur demander le bilan de leur journée. Libérés de leurs obligations hiérarchiques, les deux hommes allèrent au ravitaillement et s'assirent aux côtés de Petroc Farzer. Le repas à base de bouillie verte parut à Etel étrangement plus engageant que les fois précédentes et il mangea de bon appétit. Alors qu'il s'amusait avec ses deux voisins, son frère ne le quittait pas du regard. Et il ne le lâcha pas jusqu'à ce qu'il rejoigne la navette pour aller se coucher.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 6ème jour.
Pas d'effets secondaires aux irritations d'origine végétale. Exploration d'un nouveau site dans une zone montagneuse. Faune et flore moins développées. Caractéristiques géologiques nettement plus intéressantes. Poursuite des études en vue d'une implantation d'équipements.

Au matin du septième jour sur PF-4728, Etel se réveilla de bonne heure. Il fit une toilette rapide et descendit au campement. Comme chaque matin, Stalker s'était levé la première et préparait un petit déjeuner à base de feuilles et de racines. Le mécanicien se proposa pour aider la jeune femme à broyer les végétaux et profita de cet instant tranquille pour la remercier pour sa gentillesse à son égard. Tilina se contenta de sourire et lui tendit une tasse. Lorsqu'Alkan Verum apparut, Etel se précipita pour emballer le matériel du géologue et le placer sur un chariot de transport. Tout énervé à l'idée de partir pour une nouvelle journée d'expédition avec lui, il ne tenait plus en place. Il racontait leurs découvertes avec une exaltation qui amusa beaucoup le groupe. A l'exception de son frère. Et quand le géologue ayant fini son repas, appela le jeune Delcer, il refusa de le laisser l'accompagner.
Déçu, Etel retourna s'asseoir en boudant, pendant que les autres chuchotaient sur le retour de "Palpy, le dictateur". Le capitaine les fit taire d'un regard assassin. Chacun partit alors pour sa mission du jour, laissant les frères Delcer seuls. Même lorsque Daran décida de sortir les moto-speeders pour une reconnaissance de l'accessibilité de la zone, son frère cadet demeura éteint. Il suivit sans poser de question, mais sans enthousiasme. Ils escaladèrent la montagne jusqu'à une zone plane à quelques centaines de mètres du sommet de l'un des plus hauts pics. Ils y trouvèrent des morceaux d'un ancien module d'habitation. Très certainement des restes de la précédente expédition d'exploration passée sur la planète près d'un siècle et demi plus tôt. Comme la surface disponible était suffisamment importante pour une implantation humaine, ils mirent en place des capteurs pour la sismologie et une estimation de l'activité de la faune. Se redressant, Daran vit soudain le visage d'Etel s'illuminer. La perspective sur toute la vallée était magnifique. Ils étaient sur le toit de ce monde et tout le reste était à leurs pieds. Mais cette vision, Etel ne semblait pas la partager. Le sourire aux lèvres, il commença à crier et à agiter les bras. Son aîné vit alors le géologue et deux éclaireurs en contrebas répondre à ses saluts. Son sang se mit à bouillir et il ne dit pas un mot jusqu'à leur retour au campement. Et il passa la soirée dans son coin à regarder son frère aider les autres membres de l'expédition dans leurs derniers préparatifs d'avant départ.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 7ème jour.
Découverte d'un emplacement intéressant pour une base militaire ou une station radio. Vue panoramique sur toute la région. Prise de clichés. Approvisionnement en eau et en ressources alimentaires possible. Cartes géologique et physique établies.

Toute l'équipe se préparait au départ. Ils avaient pris leur dernier petit-déjeuner sur PF-4728 tous ensemble. Puis, chacun avait vaqué à ses occupations. Les scientifiques rangeaient leur matériel. Les éclaireurs démontaient le campement provisoire. Le capitaine effectuait les procédures préparatoires au décollage et les calculs de cap. Le mécanicien vérifiait le fonctionnement des différents systèmes de la navette. Après avoir suivi une à une les instructions du Haut Commandement des Renseignements Impériaux, les membres de l'expédition jetèrent un dernier coup d'oeil avant d'embarquer pour leur prochaine étape.
Seul Etel resta quelques temps à l'écart pour admirer une dernière fois le paysage. Il n'avait passé que quelques jours sur cette planète, mais il sentait déjà que cette expérience avait bouleversé son existence. C'est pour cela qu'il voulait conserver à l'esprit une image aussi fidèle que possible de cet environnement. D'autant plus que les autres l'avaient averti que leur prochaine étape sur une planète glacée serait moins plaisante. Enfin, il ferma les yeux, prit une profonde inspiration et monta à bord du vaisseau.
Dans le poste de pilotage, les réflexes reprirent le dessus. Il lança le décollage, guida le navette jusqu'à la sortie de l'atmosphère et entra les coordonnées du saut hyperspatial. Mais une fois les affaires courantes traitées, son esprit recommença à vagabonder à la surface. Les rongeurs. Les fougères. Les montagnes. Les ruines du campement républicain. Tant que la planète fut visible du cockpit, il ne put en détacher son regard. Son frère finit par le faire sortir de sa rêverie :
- C'était une première halte intéressante pour un novice. Tu as bien travaillé, petit frère et je crois que tu as mérité de lui donner un nom, à cette planète.
Etel réfléchit un bon moment avant de répondre.
- Je vais la nommer Primera.
Cette proposition ne sembla pas satisfaire Daran, mais reçut l'approbation des deux scientifiques.
- Assurément, un joli nom, affirma Stalker en lui donnant une tape sur l'épaule.
- Oui, répondit Etel, je pense que ce nom lui convient bien.
Puis, il repartit dans ses pensées.

Journal de bord du Disbrigo : Exploration de PF-4728, 8ème jour.
Premières analyses favorables à une implantation industrielle ou militaire. Minerais métalliques intéressants. Détecteurs de suivi en place. Passage au retour de l'expédition pour récupérer les données complémentaires. Proposition de nom : Primera. Destination suivante : PG-395. Durée estimée du voyage : 26 heures standard.

(Fin de PF-4728)

Re: Mes Chefs-d'oeuvre (by Estrildis)

Publié : 26 août 2010, 14:02
par H@n Solo
Une histoire qui se déroule sur près de 1000 ans dans une partie de la Galaxie ignorée de l'Ancienne République.
Il s'agit d'une société exclusivement humaine qui vit dans un système qui nous paraîtrait socialement archaïque alors que technologiquement avancé.

On suit l'évolution d'une famille au gré des choix des membres et des événements extérieurs.
Avec deux grandes questions : jusqu'à quel point un fait apparemment anodin et localisé peut influer le reste de la galaxie et dans quelle mesure les choix de nos ancêtres jouent sur les nôtres.
Je prévois des parallélisme de situation et autre clin d'oeil entre tomes.
Et j'essaie de créer des perso humains, avec leurs qualités et leurs défauts, leurs rêves et leurs déceptions, leurs succès et leurs échecs.

Pour le moment, je bosse sur le tout début, c'est à dire la mise en place de l'environnement, découvert au fil de la croissance du premier membre de la lignée. Et pour le moment, il a 5 ans, alors, on est pas rendus.

Je ne pense pas mettre tout le texte ici, ça risquerait d'être long à terme, mais j'annoncerai la mise en ligne des nouveaux chapitres sur SWINV. Et ceux qui souhaiteraient une version Word peuvent toujours m'envoyer un MP.

Introduction

La République Galactique avait toujours été curieuse de ce qui pouvait se produire au-delà de ses frontières. Sans jamais véritablement s’en donner les moyens. Plusieurs missions d’exploration furent bien envoyées. Mais sans grand succès. Ni grande conviction. Sans doute en raison des conflits réguliers qui la minaient de l’intérieur.

Néanmoins, en dehors de l’espace républicain, d’autres civilisations s’étaient développées. Dans les Régions Inconnues, les humanoïdes Chiss, organisés autour de leur planète-capitale Csilla, ne furent découverts que très tard. Tout comme les reptiliens Ssi-Ruuk de Lwhekk. Ou encore les humains du Secteur Ascential.

Séparés de la République par une multitude de mondes inhabités, ils semblaient ignorer l’existence de leur puissante voisine. Le Secteur Ascential regroupait une population évaluée à quarante-cinq milliards d’individus, répartie sur un bon millier de mondes. En effet, à l’exception de quelques planètes plus peuplées, ils vivaient souvent dans de petites colonies ne dépassant pas les dix mille habitants. Héritage probable de leur soif d’indépendance et de leur nature belliqueuse.

Car ils passaient le plus clair de leur temps dans des guerres internes pour la direction du secteur. Durant des siècles, Ascents et Tials se livrèrent un combat sans merci. Et le point terminal de ces luttes se situa au confluent des deux principaux groupes : le Système Varpost. Une ultime tentative de conciliation aboutit à une découpe des territoires entre les deux factions : Varkren pour les Tials, Carpostia pour les Ascents et Brionéra dirigée par un conseil mixte de dix membres. Mais une pareille solution ne pouvait être que temporaire. Et en ces temps troublés, un nouveau médiateur inattendu n’allait pas tarder à apparaître...

Re: Mes Chefs-d'oeuvre (by Estrildis)

Publié : 26 août 2010, 14:02
par H@n Solo
Une question d'honneur - Au commencement.
An -938 av. BY.
Carpitia, ville principale de Carpostia, capitale du territoire ascent.

- Oui, mettez-le là. Et faites attention, il semble suffisamment mal en point. Inutile d'en rajouter.
Les deux infirmiers posèrent la civière à l'endroit indiqué par le médecin militaire et signèrent les documents d'admission à l'infirmerie du "colis".
- Aucune autre victime ? demanda le docteur
- Trois morts sur les lieux, répondit l'un des infirmiers. Quelques entailles légères à soigner sur place. Et celui-ci qui ne passera sûrement pas la nuit. La mauvaise manipulation d'une pièce d'artillerie, ça ne pardonne pas.
- Merci, messieurs. Je vais voir ce que je peux faire pour lui.
Et l'étudiante en chirurgie militaire se pencha pour examiner le blessé inconscient. C'était un jeune homme châtain clair d'une vingtaine d'années. Plutôt grand et bien bâti. Et pas mal abîmé par l'explosion. Il avait de multiples coupures sur le visage et les bras, ainsi qu'une plaie ouverte sur le torse. Blessure sérieuse, mais pas mortelle. Non, ce qui inquiétait tant la jeune femme, comme les infirmiers auparavant, c'était la lésion qu'il avait à la jambe et qui lui avait fait perdre beaucoup de sang. Elle demanda à un des assistants de nettoyer les différentes entailles de tous les petits éclats métalliques qui avaient pu s'y loger pendant qu'elle tentait de stopper l'hémorragie.

CRP-A46983OE. Valan Aigloni, tel était le nom de ce patient. Son premier vrai patient de chirurgie. Une fois stabilisé, elle avait consulté son dossier dans les registres de la base à partir de la plaque d'immatriculation qu'il avait autour du cou. Un élève officier de l'artillerie très prometteur. Dont la carrière risquait d'être brisée par l'erreur d'un autre. Car, dès son arrivée à l'infirmerie, le chirurgien en chef avait décidé l'amputation. Il avait estimé que la blessure était trop grave et qu'il valait mieux renvoyer ce garçon à ses foyers avec une pension d'invalidité. Mais elle s'y était opposé, accusant son supérieur de choisir la solution de facilité pour être débarrassé plus vite. Parce qu'elle était convaincue qu'elle pouvait sauver sa jambe. Le vieux chef de service l'avait alors laissée prendre sa décision avec cet avertissement "S'il meure, vous devrez en répondre! Et pas seulement devant moi!" Malgré cette menace, elle l'avait opéré à deux reprises. Une première fois pour retirer les corps étrangers et les chairs malades. Et une seconde pour consolider les os brisés et remplacer les éléments détruits. Puis, elle avait veillé plusieurs heures au chevet du blessé, attendant qu'il se réveille. En vain.

Lorsqu'il ouvrit enfin les yeux quelques jours plus tard, Valan ne vit qu'un environnement blanc complètement flou. Quand il essaya de se lever, son corps le rappela à l'ordre. Tous ses muscles étaient douloureux, son corps était comme déchiré. Il passa ses mains sur son visage et y sentit que des bandages. L'inquiétude monta en lui. Où pouvait-il être ? Que lui était-il arrivé ? Il ne se souvenait pas. Un exercice sur le terrain d'entraînement. Puis, plus rien. Il avait la bouche sèche, mais il fut incapable d'articuler un son compréhensible pour qu'on lui apporte à boire. Il se mit à agiter les bras tout en poussant des grognements pour que quelqu'un vienne à son secours. Peu lui importait la douleur, il voulait qu'on le sorte de là. Et pendant un temps qui lui parut infini, personne ne vint. Puis, le flou s'obscurcit et il lui sembla qu'on parlait à côté de lui, mais tout lui était indistinct. Il cessa alors de hurler et agita la tête pour comprendre d'où cela provenait. Et petit à petit, il put saisir le message : "Calmez-vous, Valan. Vous êtes en sécurité à l'infirmerie. Je vais m'occuper de vous et tout ira bien." Apaisé, il se détendit et se rendormit.

Une heure plus tard, le jeune homme se réveilla de nouveau. Et cette fois-ci, le décor lui parut plus normal et net. Il voyait clairement les pansements sur ses bras, les barreaux du lit, l'appareillage médical et surtout la jolie jeune femme en uniforme des Services de Santé qui lui souriait. Un instant, Valan se demanda s'il ne rêvait pas. Si ce merveilleux docteur aux longs cheveux dorés n'était pas un tour joué par son esprit. D'autant plus qu'il avait cette étrange sensation de flottement. Mais la jeune femme lui prit la main et lui demanda doucement comment il se sentait. De sa voix enroué, il parvint à lui répondre un "mieux". Elle lui passa alors tendrement la main dans les cheveux et lui dit qu'il ne devait pas s'inquiéter, que ses perceptions sensorielles reviendraient quand l'effet des médicaments s'estomperaient. Puis, elle lui raconta son accident : le mauvais chargement de l'obus, l'explosion de la pièce d'artillerie, les morts, son arrivée grièvement blessé à l'infirmerie et son opération. En l'écoutant, des images lui étaient revenues. Et des cris lui résonnaient dans la tête. Mais la voix du docteur était sereine et réconfortante. Bien sûr, elle l'avait averti qu'il ressentirait bientôt de vives douleurs à la poitrine et à la jambe. Mais il était tiré d'affaire et il se savait dans de bonnes mains.

Le docteur le laissa récupérer encore quelques jours, puis elle établit un programme de rééducation pour son patient. Valan s'y astreignit sans trop se plaindre. Cependant l'impatience se lisait sur son visage. Il avait dû quitter le stage de formation des officiers artilleurs et ne pensait qu'à le réintégrer. En attendant, il était cloué au lit, dans l'incapacité qu'il était de s'appuyer sur sa jambe blessée. Au début, il avait un peu protesté, mais le médecin s'était montrée ferme et il n'avait pas insisté. Tant qu'elle ne serait pas rassurée sur la cicatrisation de ses blessures, il resterait en pension complète à l'infirmerie. Telle était la règle. Et dès qu'elle eut constaté que la guérison était sur la bonne voie, il put sortir et suivre les cours, comme elle le lui avait promis. En veillant toutefois à ne pas forcer et au prix d'une impressionnante armature de soutien pour son genou.

- Non, je ne me joindrai pas à vous pour le dîner, avait-elle dit sèchement quand Valan était entré à l'infirmerie.
Il avait regardé tout autour de lui pour comprendre à qui elle avait bien pu parler. Mais il n'y avait qu'eux deux.
- A vrai dire, je ne comptais pas vous inviter à dîner, je suis de service ce soir, avait-il répondu gêné.
Elle le retourna et le regarda, la bouche ouverte, comme surprise de le voir là.
- Vous m'aviez demandé de passer pour un contrôle de mon genou et une séance d'exercices.
- Oui. Je vous prie de m'excuser pour cet accueil. Je vous avais pris pour quelqu'un d'autre.
- Si vous préférez, je repasserai plus tard...
- Non. Au contraire. Et votre jambe ne guérira pas toute seule. Allez vous installer dans la pièce voisine, j'arrive pour vous ausculter.
Il s'assit donc sur le lit et ôta sa chemise. Elle enfila une paire de gants et s'assit à ses côtés pour examiner sa plaie à l'abdomen. Elle retira doucement le pansement humecté de cicatrisant et contrôla l'évolution de la plaie. Satisfaite, elle passa au genou en démontant l'imposante prothèse avec délicatesse et releva la jambe du pantalon. Et commencèrent alors des exercices de rééducation qui durèrent près d'une heure. Jusqu'à ce qu'on frappa à la porte de l'infirmerie. Le médecin laissa Valan se rhabiller pour aller ouvrir. Et le jeune homme entendit rapidement le ton monter entre le docteur et le nouvel arrivant. Il hésita quelques temps avant de se décider à intervenir. Il boita jusqu'à la porte, apparut dans l'encadrement, sa monstrueuse genouillère à la main et dit d'une voix forte :
- Il me semble que la demoiselle vous a demandé de la laisser en paix, monsieur !
Valan identifia alors l'importun comme étant le Capitaine Freon Varsolino, fils d'un éminent dignitaire de l'organisation ascent. Et il devint tout blanc. L'officier le toisa d'un air narquois et s'en alla en soufflant à l'oreille de la jeune femme :
- Je vous quitte, ma chère. Votre fiancé est un brin jaloux, si vous voulez mon avis.
- Ce n'est pas mon fiancé, mais mon patient. Et apprenez que je me moque éperdument de votre avis.
Une fois que Varsolino fut sorti, Valan s'assit sur le bureau, le souffle court, près de s'évanouir et regarda son médecin d'un air implorant.
- Je n'aurais jamais dû intervenir, lâcha-t-il, dépité.
- Au contraire, je vous suis reconnaissante de vous être interposé. Je ne sais pas de quoi ce fou était capable. Et la prothèse, comme arme, il fallait y penser !
Et ils rirent ensemble de bon cœur.

Après plusieurs décades de séances de rééducation, Valan eut un dernier rendez-vous à l'infirmerie avant de pouvoir ranger définitivement ses armatures au placard. Comme toujours, son médecin préféré l'attendait, le sourire aux lèvres. Mais cette fois-ci, elle paraissait encore plus excitée que d'habitude. Elle l'ausculta rapidement et lui annonça enfin que son genou était parfaitement opérationnel. Puis, elle lui tendit un document. Valan le prit en mains et le lut avec application et sérieux, hochant régulièrement la tête en direction de la jeune femme comme pour montrer son approbation. Etonnée de le voir mettre tant de temps à déchiffrer les quelques lignes et impatiente d'avoir sa réponse, elle finit par lâcher :
- Alors ? Qu'en pensez-vous ?
- C'est bien !
- C'est bien ? demanda-t-elle surprise de sa réponse. Je voulais plutôt savoir si vous comptiez m'accompagner.
- Vous accompagner ? Où ?
- Ben, au Congrès de Médecine dont vous tenez l'invitation dans la main droite ! Un éminent spécialiste de la chirurgie militaire est intéressé par votre cas et aimerait vous rencontrer.
Valan la regarda, la bouche grande ouverte, durant quelques secondes. Puis il baissa les yeux et se contorsionna les mains. La jeune femme comprit sa gêne :
- Vous n'aviez pas compris parce que ... vous ne savez pas lire, dit-elle en abaissant la voix.
- Non, je ne sais pas lire, s'emporta-t-il brusquement. Et alors ?
- Et alors ? C'est le mal de notre société, Valan. Vous êtes le major de la nouvelle promotion d'officiers artilleurs, l'une des spécialités les plus exigeantes de notre flotte, et vous ne savez pas lire. Pourquoi ? Parce que vous êtes trop idiot ?
Valan ne répondit pas, mais lui lança un regard à faire froid dans le dos.
- Non, vous n'êtes pas idiot, Valan Aigloni. Et je vous interdit même de le croire. Seulement, personne ne s'est donné la peine de vous l'apprendre. Seulement, le Haut Commandement n'a pas jugé qu'il vous était nécessaire de savoir lire pour viser juste.
Le jeune artilleur ne décolérait pas. Sa rage était telle qu'il en tremblait. Mais elle poursuivit :
- Comme il ne jugeait pas nécessaire de vous sauver après votre accident.
- Comment ?
- J'ai pris sur moi de vous reconstruire un genou. Le chirurgien en chef avait décidé de vous amputer et de vous renvoyer chez vous avec une pension.
- Je l'ignorais.
- Ce n'est pas le genre de faits dont il aime se vanter. Etre dépassé par l'un de ses étudiants.
- Je vous remercie... Pour l'opération.
- Il n'y a pas de quoi. J'ai toujours estimé stupide de créer des armes de plus en plus destructrices sans jamais se soucier des moyens pour rétablir les soldats mutilés par ces horreurs. Voilà pourquoi j'ai besoin de votre aide. Que vous témoigniez au Congrès de Médecine. Que votre parcours leur prouve que cela vaut la peine que les médecins se battent pour soigner les blessés.
Elle en avait les larmes aux yeux. Il comprit que cela lui tenait à cœur. Et jugea qu'il lui devait bien ça.
- Je vous accompagnerai, promit-il.

Juste avant son premier départ avec sa nouvelle affectation, Valan Aigloni décida de faire une dernière visite à l'infirmerie. Il frappa à la porte et entra. Il s'était renseigné sur ses horaires et il avait appris qu'elle était de permanence cet après-midi-là. Il la trouva comme prévu à son bureau, plongée dans ses dossiers. Elle leva la tête et lui sourit :
- Enseigne Valan Aigloni ! Que me vaut l'honneur de votre visite ?
- Il me semble que je vous dois un dîner. Rappelez-vous, j'ai été contraint de décliner votre offre car j'étais de service ce soir-là. Et comme il s'agit de ma dernière soirée à Carpitia avant un bon bout de temps, je souhaiterais régler ma dette avant de partir.
- Admettons. Et quel est le programme ?
- Si je vous le dis, ça ne sera plus une surprise.
- Très bien. Je finis ce que j'ai à faire et je suis à vous.
Elle éteignit sa console et se laissa guider. Il la conduisit sur son nouveau bâtiment, le tout dernier destroyer sorti des chantiers navals de la planète, le Etel Sourco, ainsi nommé en l'honneur du fils aîné de l'empereur ascent. Il profita que le vaisseau soit pratiquement vide à quelques heures du départ pour lui faire faire le tour de son univers : les turbolasers, les lanceurs d'obus, les orifices de maintenance qui longeaient la coque, puis les quartiers d'habitation, la cantine et l'infirmerie. C'était sa façon à lui de la remercier de l'avoir sauvé. Patiente, elle l'écoutait lui expliquer comment il commandait l'orientation des armes à partir de sa console. Puis, ils quittèrent le destroyer pour aller dîner.
Alors qu'elle s'attendait à manger dans l'un des multiples bars qui jalonnaient les enceintes de la base, il l'emmena dans un petit restaurant loin de l'agitation des adieux. Des musiciens jouaient dans un coin de la salle. La table était propre et bien disposée. La vue sur les lumières du spatioport était magnifique. Et la carte donnait l'eau à la bouche. Elle secoua la tête en pensant qu'il allait sûrement y laisser toute son avance de départ, mais elle oublia bien vite en voyant arriver les assiettes largement garnies. Puis, il lui sourit en affirmant qu'il allait déguster ce plat, son dernier steak de carlan avant un bon bout de temps. Après ce plaisant repas, ils se promenèrent un bon moment dans les rues de Carpitia, avant qu'il ne la raccompagne jusqu'à son infirmerie. Il lui présenta ses hommages et s'apprêtait à prendre congé quand elle le retint par la main :
- Pourquoi faites-vous cela ? Vous ne savez même pas comment je m'appelle.
- Bien sûr que si.
Elle le regarda intriguée. Il lui répondit en souriant :
- Depuis ce midi, vous vous appelez Docteur.

Fin de la première nouvelle.